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Flore et végétation
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Les végétations climaciques

À chaque étage son locataire

Chênaie verte

   Entre 300 et 500/600 m, les températures moyennes annuelles dépassent 12°C, la moyenne des minimas de janvier est positive, la pluviométrie conséquente (± 700 mm), mais avec un net creux estival (moins de 100 mm). Dans ces conditions, qui caractérisent l'étage mésoméditerranéen, la végétation est dominée par le chêne vert et le pin d'Alep.

   Le chêne vert est adapté au climat méditerranéen par ses feuilles réduites et vernissées en dessus, duveteuses en dessous (limitant l'évapotranspiration) toujours vertes. Peu exigeant il s'accommode de sols superficiels à forte sécheresse estivale.

   La yeuseraie est ainsi bien présente sur les collines en balcon de la Durance, depuis Corbières jusqu’à Lurs, et sur les contreforts du plateau de Valensole.
   Le sous-bois, peu pénétrable, est un "fouillis" qui associe cade, asperge sauvage, petit-houx, nerpruns, rouvet, filaires, salsepareille, clématite, chèvrefeuille…

   Dans des conditions rocheuses plus inhospitalières, on observe une yeuseraie rupicole où le chêne est accompagné de toute une végétation liée aux rochers.
   Dans les zones situées plutôt aux ubacs, en pied de parois, à l’entrée des avens, des chênaies vertes ombragées et fraîches hébergent quelques fougères et de beaux lierres en draperies..

   À Saint-Michel-l'Observatoire ou à Sainte-Croix-à-Lauze, d'improbables mais heureux hasards historiques ont préservé quelques îlots forestiers des activités humaines. Les chênes s'y présentent alors en futaies aux arbres de "franc pied" à la hauteur et au diamètre conséquents, donnant un aperçu de ce que pouvait être la forêt méditerranéenne avant sa surexploitation. Ces noyaux constituent d'importants réservoirs biologiques par leurs cortèges de flore, faune et fonge originaux. Ils constituent un enjeu majeur de la préservation de la nature et de la biodiversité pris en compte dans le code forestier par la loi de juillet 2005, et par la Directive Européenne Natura 2000.

   Deuxième grande composante de cet étage, les peuplements à base de pins d’Alep qui forment de beaux boisements vers Ganagobie par exemple.

   Le pin d’Alep est plus frileux que le chêne vert mais encore mieux adapté que celui-ci à la sécheresse, annuelle comme estivale. Pionnier, il colonise rapidement les espaces mis à sa disposition par les incendies ou les cultures abandonnées. C'est avec le temps et sous son ombrage que se reconstituera, si le sol le permet, la chênaie verte.

   Une dégradation des pinèdes et yeuseraies conduit à des formes de végétation différentes, moins fournies, appelées garrigues et fruticées quand elles sont composées principalement d’arbustes, et pelouses quand dominent les herbacées.

   Les garrigues et pelouses sèches sont le plus souvent le résultat d'activités humaines (coupes de bois, pâturage, essartage, écobuage,…), ou d'incendies. Après leur mise en place, le climat, avec des pluies rares mais violentes et le mistral, en emportant le sol, contribue à leur maintien. Dans les cas extrêmes, état dit "para-climacique", quand les sols deviennent trop squelettiques, la reconstitution forestière devient impossible (au moins à l'échelle humaine).
   Inondées de soleil, elles concentrent une flore très spécialisée, adaptée aux conditions les plus extrêmes de chaleur et d'aridité. Elles présentent deux faciès selon la géologie.
- La garrigue à romarin s’installe sur les calcaires friables et marneux. C’est sur les pentes de marnes rouges du plateau de Valensole autour de Sainte-Croix-de-Verdon qu'elle présente son plus beau développement.
- La garrigue à chêne kermès, plus fragmentaire dans le département, préfère quant à elle les substrats plus compacts.

   Les garrigues sont des formations parfaitement adaptées au passage du feu. La régénération arbustive y est très rapide par la force des rejets de souches, et certaines espèces pyrophytes (adaptées aux incendies) comme le ciste blanc et le pin d’Alep y sont favorisées. En cas d’incendies trop répétés les garrigues font place, dans le sens d’une évolution régressive, à des complexes de pelouses sèches ouvertes. Le brachypode rameux domine aux côtés d'une exceptionnelle richesse en espèces annuelles et bulbeuses méditerranéennes.

   Ces types biologiques correspondent à deux stratégies visant à "shunter" la "mauvaise" saison estivale. Les annuelles la passe sous forme de graines (petites luzernes, trèfles, astragales, trigonelles, bromes, buplèvres, céraistes, crucianelles, euphorbes, gesses, vesces, vulpins,…), les bulbeuses sous forme d'organes de réserve souterrains (orchidées, muscaris, aulx, gagées, scilles, ornithogales, crocus, …).
   Au printemps, ces milieux sont particulièrement connus pour être le domaine d’expression de magnifiques parterres fleuris d'iris nain de couleur violet ou jaune et du petit narcisse à feuilles de jonc à la délicate fleur jaune.

   À Pierrevert, sur les piémonts sud du Luberon, les marnes de Viens, très ravinées, constituent une zone d’exception. Une végétation ouverte à semi-ouverte associe à la fois des pelouses à canche moyenne, à aphyllanthe de Montpellier et des junipéraies à cade et genévrier commun. On y rencontre plusieurs espèces remarquables dont deux raretés, le sainfoin bas d'Europe (Hedysarum boveanum subsp. europaeum) au feuillage cendré et fleurs pourprées, et le grémil ligneux (Lithodora fruticosa ) petit arbuste, toujours vert, aux fleurs pourpres en début de floraison puis bleu foncé éclatant au plein épanouissement. D'autres plantes rares sont présentes dans ces zones marneuses comme Arceuthobium oxycedri, petit gui qui parasite le genévrier oxycèdre, le sérapias à labelle allongé (seule station bas-alpine connue), l'ophrys de Provence ou l'euphorbe à têtes jaune d'or.

   Entre Céreste et Lurs, une série de dépressions et bombements successifs est constitué d'affleurements gréseux, originaux dans le contexte général marno-calcaire du Luberon. Avec les 300 ha des Craux de Saint Michel-l’Observatoire/Mane qu'elle englobe, elle abrite d'autres joyaux naturels. Ces milieux ouverts, façonnés et encore entretenus par le pastoralisme sont d’une diversité floristique exceptionnelle comprenant de nombreuses espèces rares ou intéressantes pour le département : anthémis de Gérard, ail rocambole, cynoglosse à feuilles de giroflée, petite éragrostide, euphorbe sillonée, inule changeante…
   Par ailleurs s’égrènent également à travers ce vaste bandeau de molasses et sables désagrégés toute une série de petits reliefs, buttes ou éperons rocheux : La Combe (Céreste), Barre de Laye (Mane), La Rabourine/Monessargues (Lurs), Toutes-Aures (Manosque), … où se rencontrent d'autres espèces remarquables : Gagea lacaitae, scabieuse étoilée, orpin rougeâtre, le bugrane à fleurs courtes, vesce noirâtre, sans oublier la spectaculaire Vicia dalmatica, petit buisson de tiges entremêlées à feuilles étroites (1 à 2 mm de large) et fleurs à belles corolles d’un beau bleu pâle liliacé. Cette espèce, originaire de l’Ouest de l’Asie (Caucase), atteignant la Hongrie par le nord et l’Italie vers l’ouest où elle est rare, se retrouve en limite d’aire absolue dans quelques très rares stations du sud-est de la France.

Chênaie blanche

   La Blache, Les Blaches, Blachière, Blachette, mais aussi le Ravin des Chênes, La Chênaie, la Croix du Chêne ou les Trois Chênes… nombre de lieux-dits trouvent l’origine de leur nom dans la présence de bosquets, bois ou forêts de chênes blancs. Quercus pubescens Willd., chêne blanc ou pubescent, est l’essence la plus commune du département à l'étage supraméditerranéen ou collinéen. Ses formations et les fruticées ou pelouses que l’on y rattache couvrent les deux tiers du département.

   Espèce à large amplitude écologique le chêne blanc occupe un vaste croissant des Alpes-Maritimes à la Drôme entre plus ou moins 600 et 1400 m, où la température annuelle moyenne est de l’ordre de 11 à 13°C (celle de janvier entre 0 et 3°C) et la pluviométrie supérieure à 600 mm.

   Marginalement représenté dans le mésoméditerranéen, le chêne pubescent domine les paysages aux étages supraméditerranéen et collinéen.
   Le terme "collinéen" est utilisé en zone tempérée pour qualifier tout à la fois les conditions écologiques des premières pentes des montagnes et la végétation qui les occupe. Quand ce collinéen est modifié par l’influence méditerranéenne, on parle de supraméditerranéen.
   Dans notre département, zone charnière, les deux se côtoient, voire s’imbriquent. Le collinéen est présent au nord de Sisteron, en basse Ubaye et dans un "îlot ligure" remarquable autour d’Annot, le supraméditerranéen couvrant l’essentiel du territoire. Ainsi modulée par le climat et la géologie la chênaie blanche se présente sous plusieurs formes.

   Chênaie blanche édaphique

   À basse altitude, le chêne pubescent ne peut s'installer que sur des sols profonds au pouvoir de rétention en eau important, mais bien drainés. Le cortège floristique de cette chênaie blanche "édaphique" (par opposition aux chênaies "climatiques" du supraméditerranéen déterminées par la présence d'une humidité atmosphérique plus importante) présente la plupart des espèces de la chênaie verte avec cependant une meilleure représentation de certaines d’entre elles comme l’aphyllanthe, la psoralée ou la cupidone. Le pois à bouquet (Lathyrus latifolius) qui étale au sol ses longues ramures de fleurs roses au mois de juin, en constitue l’élément le plus spectaculaire et différentiel.
   Les milieux ouverts sont essentiellement représentés par des fruticées hautes à génévrier oxycèdre et à spartier et des pelouses largement dominées par l’hégémonique brachypode de Phénicie.

   Chênaie blanche supraméditerranéenne calcaire

   Au supraméditerranéen, chênes blancs et pins sylvestres sont les essences les plus fréquentes, les pinèdes constituant une étape vers la reconstitution de la chênaie blanche.
   Ces boisements hébergent une grande variété d’espèces caducifoliées dites subordonnées avec érables, sorbiers, alisiers, noisetier, amélanchier, cornouiller mâle.
   Ce schéma très général est souvent faussé par les activités humaines. En témoignent les grandes étendues (régions de Barrême, Digne-les-Bains, La Javie, …) reboisées au XIXe siècle, principalement avec du pin noir d’Autriche.

   Mais les forêts ne sont qu’une des composantes de ces chênaies. Aux stades précédant leur maturité, ou résultant de leur dégradation, se reconnaissent deux physionomies bien distinctes, buissonnante et herbacée… et tous leurs intermédiaires.
   On donne le nom de fruticées aux formations ouvertes buissonnantes et arbustives. Comme pour les forêts, les cortèges végétaux rencontrés réunissent les espèces "propres" à la chênaie blanche, genêt cendré, buis, amélanchier et lavande fine, pour les plus caractéristiques, des espèces en limite de leur aire méditerranéenne, et des espèces "descendues" des montagnes… L’aphyllante de Montpellier ne dépasse guère Digne-les-Bains vers le nord, alors que l’épine-vinette est absente d’un bon tiers sud-ouest du département.
   Les pelouses qui couvrent les clairières ou les parcours pâturés (mais aussi les pistes forestières et les bords des routes régulièrement fauchés), sont dominées par le brome érigé, la fétuque cendrée, le brachypode penné, la koelérie du Valais.

   Chênaies blanches acidophiles

   Autour de Vachères et Revest-du-Bion, le châtaignier et le chêne sessile signalent la chênaie supraméditerranéenne acidophile.
   Elle forme, avec l’ensemble des espèces qu’elle héberge, rares voire présentes seulement dans ce secteur en Provence, ce qui est probablement la végétation la plus remarquable des Alpes-de-Haute-Provence.

   Au sud-est du département, la vallée du Var permet des remontées nuageuses depuis le golfe de Gênes qui tempèrent l’aridité méditerranéenne. Deux formations particulières s'y développent.

   Entre Saint-Benoît et La Rochette, les ubacs et fonds de vallée abritent des boismements de charme-houblon (ostryaies). Comme celui-ci, l’érythronium dent-de-chien, la ballotte épineuse ou le cytise d’Ardoino sont ici en limite occidentale de leur aire.
   Cet "ajout" auquel correspond la disparition d’espèces méditerranéennes (aphyllanthe, spartium, …) définit la chênaie méditerranéenne de type ligure dont l'euphorbe de Canut est une bonne caractéristique.

   Dans la région d’Annot l’augmentation de la pluviométrie et de l’altitude rappelle les régions tempérées plus arrosées. Les roches gréseuses, à l’origine de sols acides rares dans le département, renforcent l’originalité du secteur.
   Des végétations très particulières se développent, affines des peuplements homologues de Ligurie, dont elles représentent la terminaison vers l’ouest. S’y rencontrent, jusqu'à 1500 m d'altitude, des chênaies blanches de type acidophile à chêne sessile. Les stricts silicicoles genêt ailé, orchis de Provence et centaurée de Jordan, accompagnés du rare orchis punaise, se rencontrent dans les nombreuses châtaigneraies.

   Chênaie blanche collinéenne

   Il faut rejoindre le nord-est du département, dans le Bassin du Sasse et autour des Monges pour observer muguet et "petit" muguet. On parle de collinéen delphino-jurassien, pour qualifier le contexte que signent ces espèces et dont ce secteur des Alpes-de-Haute-Provence est la limite sud.

   Chênaie blanche interne

   La chênaie blanche ne "descend" pas sous l’isotherme 11°C. Dans le haut Verdon, elle ne dépasse pas Colmars-les-Alpes. Elle atteint l’Ubaye en suivant le cours de la Durance, mais y reste cantonnée aux adrets les mieux exposés (Le Lauzet-Ubaye, La Condamine Châtelard,).
   Cette chênaie intra-alpine se présente sous une forme appauvrie, avec la disparition progressive du buis, de l'arbre à perruque ou du genêt cendré, remplacés par des espèces alpines comme le prunier de Briançon ou le genévrier sabine, et d'espèces à large répartition comme l'alisier, l'érable opale, le cornouiller sanguin, le noisetier, l'hellébore fétide, la campanule gantelée ….

   Forêts de ravins

   La topographie marquée est une autre source de diversification au sein de la chênaie blanche.
   Les ravins qui entaillent les reliefs calcaires présentent des conditions écologiques particulières. Par le manque de soleil et l’air froid qui, plus dense, stagne dans les talwegs, l'ambiance est plus fraîche et l'atmosphère plus humide que sur les croupes qui séparent ces ravins ou les plateaux qu’ils entaillent. Au fond, le sol est maigre, rocailleux et plus ou moins mouvant, régulièrement remanié par les orages.
   Dans ces conditions particulières les rochers ombragés sont colonisés par des mousses, la saxifrage à feuilles en coin et des fougères rupicoles comme le réglisse des bois. L'humus généré par ces végétaux va former une ébauche de sol très riche en matière organique sur lequel des herbacées et arbustes préforestiers vont se développer. Des graines de tilleul à larges feuilles vont germer pour constituer à terme une forêt infiltrée par l'érable opale et l'alisier. C'est au sein de cette tillaie de ravin que l'on rencontre le rare cyclamen rouge-pourpre.

   L'origine de la chênaie blanche

   Il y a 18 000 ans, la terre voit le dernier de la vingtaine d’épisodes glaciaires qui ont, durant deux millions d’années, rythmé cette période de l’ère quaternaire. Suivant leurs capacités évolutives et leurs facultés de "déplacement" les végétaux ont subi différemment ces chocs glaciaires. Certains ont disparus, quelques-uns se sont maintenus sur le front glaciaire quand d’autres ont migré dans des zones refuges, avant de recoloniser le terrain durant les périodes de réchauffement.
   À ce petit jeu, les chênes se sont montrés particulièrement adroits. Réfugiés en Espagne, Italie et dans les Balkans, ils reconquièrent l’Europe en moins de 6.000 ans.
Les forêts de chênes provençales sont issues pour partie de la péninsule ibérique et pour une autre de la botte italienne.
   Cette recolonisation a été extrêmement rapide, évaluée, en moyenne, à 500 m par an, soit plus que celle "prévue" par la seule action des agents de dispersion des glands que sont les geais ou les rongeurs. Pour tenter de résoudre cette énigme, des simulations informatiques ont été réalisées, qui suggèrent que prendre en compte quelques rares dispersions à longue distance peut expliquer une telle vitesse de migration.
   Certains auteurs avancent que des micro-populations refuges, non détectées par les études, ont pu persister plus au nord pendant la période glaciaire, alors que d'autres invoquent le rôle de l’homme en tant que disperseur "longue distance". En effet, notre espèce a migré à la même époque et dans le même sens. Il n’est donc pas exclu que l’homme en transportant des glands pour sa nourriture, ait contribué à la migration des chênes (Kremer et al, 2002).

Forêts de montagne

   Au-dessus de ± 1200 m, parcourir les secteurs montagneux des Alpes-de-Haute-Provence en remontant le haut Verdon, puis en suivant l'Ubaye avant de redescendre sur Digne-les-Bains permet de découvrir cinq grands types de paysages forestiers - sapinières, mélézins, hêtraies, pessières, pinèdes sylvestres - et, plus ponctuellement, quelques placages de pin à crochet, des forêts "de ravins" dominées par l'érable et le tilleul.
   Reflet des conditions climatiques, la présence du hêtre définit les Alpes dites externes tandis que l'implantation massive du mélèze et la disparition totale du hêtre définissent les Alpes internes. Entre ces deux zones, on distingue les Alpes intermédiaires ou zone méso-alpine où se rencontrent les forêts de mélèze les plus occidentales et les hêtraies les plus orientales.

   Étage montagnard

   Au dessus de la chênaie blanche, se rencontrent pinèdes sylvestres, hêtraies et sapinières.

   La pinède sylvestre est la formation dominante. Espèce pionnière et "rustique", elle est le stade "d'équilibre" sur les sols les plus maigres ou soumis aux conditions climatiques les plus sèches. Mais c'est aussi la première à apparaître dans les espaces libérés par l'exploitation forestière ou la déprise agricole.
   Elle occupe les versants "méditerranéo-montagnards", les pentes chaudes et ensoleillées de l'Ubaye, mais aussi les ubacs et versants d'exposition intermédiaire autour de Digne-les-Bains, Castellane et Annot. Ces pinèdes plus fraîches sont aussi présentes sur les ubacs des vallées internes, mais avec une strate arbustive différente. Le buis est absent, remplacé par le raisin-d'ours, le polygale faux-buis et des arbrisseaux comme le daphné camélée.
   Près d'Annot, des pinèdes acidophiles hébergent la seule plante endémique stricte des Alpes-de-Haute-Provence, la centaurée de Jordan (Centaurea jordaniana subsp. jordaniana).

   Sapinières et hêtraies sont les deux autres formations occupant des surfaces significatives de l'étage montagnard quand l'atmosphère est plus humide. Leur répartition respective est dictée par leur tolérance à la sécheresse estivale et aux gelées précoces et tardives.

   Originaire de l’Europe moyenne, le hêtre est une espèce de plaine dans le nord de la France qui se retranche en montagne dans le midi. Il semble, dans notre département, qu'il ait besoin de précipitations printanières lors de la pleine période de végétation. Il est très sensible aux gelées tardives et s’élève moins en altitude que le sapin. La durée de la sècheresse estivale, plus que son intensité, est une autre de ses limites, il ne tolère pas plus d'un mois de sècheresse durant l'été.

   En Europe, le sapin occupe les régions montagneuses et dans notre département il apparaît le plus souvent à l'étage montagnard moyen et supérieur et à la base du subalpin. Il tolère, comme le hêtre, un large éventail de conditions de sol. Par contre, moins adapté à la sécheresse, il est plus résistant aux gelées printanières ce qui permet sa présence jusque dans le subalpin inférieur où l'évaporation est moindre, les précipitations plus conséquentes, mais les gelées tardives plus nombreuses.

   Ces éléments expliquent la différence de répartition des deux essences. Les hêtraies, plus abondantes dans les Alpes externes, occupent une diagonale de la Montagne de Lure et des Monges au Préalpes de Digne puis de Castellane et au pays d'Annot. Elles se raréfient dans les Alpes intermédiaires et disparaissent des Alpes internes (Ubaye, Haut-Verdon). En revanche les sapinières sont mieux représentées dans les Alpes intermédiaires dans le pays de Seyne, en haute Bléone, dans le haut Verdon et s'avancent jusque dans les Alpes internes, en Ubaye.
   À cette répartition naturelle s'ajoute l'impact de l'exploitation forestière. Dans le passé, les hêtraies-sapinières dominaient probablement mais la surexploitation du sapin comme bois d'œuvre a progressivement transformé ces peuplements en hêtraies pures reléguant le résineux dans les zones les plus inaccessibles. L'ouverture des forêts au pâturage a été aussi responsable de la raréfaction du sapin dont les jeunes pousses sont broutées. Par la suite, le hêtre a été particulièrement exploité, comme bois de chauffage notamment, ce qui explique sa raréfaction et la prédominance des taillis au détriment des futaies.
   Ainsi, selon les secteurs, on observe des hêtraies, des hêtraies-sapinières ou des sapinières mais le cortège floristique de ces boisements reste très proche et on peut y noter les mêmes variations de faciès.

   Vers 1600 m, d'autres forêts de hêtre et de sapin apparaissent, sur les versants frais bien arrosés, qui se distinguent par un sous-bois moins thermophile.

   Dans les couloirs très ombragés et abrupts au microclimat froid et humide, le sol instable freine l'installation du hêtre et du sapin. L'érable sycomore domine les forêts de ravins, parfois associé à l'orme des montagnes. La strate arbustive est diversifiée et la végétation herbacée, haute et opulente, riche en dicotylédones à larges feuilles et en fougères.

   Dans les Alpes internes le hêtre disparaît et le sapin se cantonne aux endroits les plus frais, généralement des ubacs escarpés, parfois des flancs est. De telles sapinières sont observées en Ubaye, en boisements discontinus jusqu'à Tournoux et dans les vallées affluentes du Laverq et du Bachelard où elles s'élèvent jusque vers 2000 m. Au Laverq, l'épicéa peut dominer sur les grés d'Annot. La flore comprend encore des espèces des sapinières préalpines mais s'enrichit en acidiphiles.

   Étage subalpin

   À l'étage subalpin, les résineux règnent en maîtres, mieux adaptés au froid que les feuillus. Les rares qui s'aventurent à cette altitude comme le bouleau verruqueux, le sorbier des oiseleurs et quelques saules ne forment pas de véritables forêts.
La transition des sapinières montagnardes avec forêts subalpines s'opère par un enrichissement en épicéa, mélèze et pin cembro.

   Peu développées sur le territoire les pessières subalpines sont localisées aux secteurs les plus arrosés de la zone interne, comme dans la vallée du Laverq et dans le Bachelard.

   Le pin à crochets est une autre essence localisée dans le département qui ne constitue de vrais boisements qu'en Ubaye sur les substrats calcaires les plus sévères où, particulièrement rustique et frugal, il relaye le pin sylvestre en altitude jusqu'à limite supérieure de la forêt.
   De beaux boisements se rencontrent dans le vallon de Terre Pleine, au-dessus de Jausiers, à Méolans-Revel, au pied des hautes parois de l'Ailette, ou encore sur la montagne de Dormillouse, au-dessus du Lauzet-Ubaye.

   Dans leurs zones de contact, le pin à crochet s'hybride régulièrement avec le pin sylvestre. Pinus x bougeti, cet hybride, est assez régulièrement observé en Ubaye mais aussi dans quelques secteurs des Préalpes comme dans la région de Peyresq.

   Mais l'essence dominante de l'étage subalpin des Alpes internes reste le mélèze, qui, en parant de jaune des versants entiers à l'automne, rappelle qu'il est le seul conifère européen à se dépouiller en hiver.

   Sur les terrains acides s'installe l'arole, concurrent du mélèze, facilement reconnaissable comme seul pin en France à aiguilles groupées par cinq (et non deux). Au Laverq sur les grés d'Annot, ou sur les flyschs gréseux du bois de l'Eyssiloun à Fouillouse, de jeunes arolles se développent alors que le mélèze, par manque de régénération, se trouve en perte de vitesse. À terme, la forêt originelle d'aroles pourrait alors lentement se réimplanter.

   Au-dessus de la limite de la forêt, dans la zone "de combat" entre arbustes et herbes, mélèzes et aroles, tout aussi résistants au froid, aux écarts de températures, aux gelées, à la surcharge de neige comme aux vents violents, tentent de recoloniser le milieu. Grâce à ces précurseurs, d'année en année, la limite supérieure de la forêt s'élève et retrouve peu à peu ses marques d'antan.

   Enfin, pour terminer ce rapide tour d’horizon de la végétation que l’on peut rencontrer en montagne, il convient de s’arrêter quelques instants sur le cas très particulier du genévrier thurifère.
   Découvert par Dominique Villars à la fin du XVIIIe siècle, il n’est connu que dans quelques aires disjointes en Algérie, au Maroc, en Espagne et en France où il est présent au pied des Pyrénées centrales et dans les Alpes.
   Sa physiologie, lui permet de s’adapter à des milieux très contraignants et de s'établir sur les vires et parois calcaires.
   Il forme aussi des boisements plus ou moins denses, des fruticées hautes, âgées et accompagnées de peuplements mûrs que l'on peut considérer comme des groupements forestiers. En contact avec les peuplements de chênes pubescents, il présente diverses physionomies, des faciès dégradés des chênaies pubescentes à genévrier commun et genêt cendré, aux faciès boisés à pin noir jusqu'à ceux très originaux à érable de Montpellier, typiques des Préalpes méridionales calcaires. Ces derniers boisements se rencontrent de 800 m à 1330 m dans les Préalpes de Digne, en haute Bléone et dans le haut Verdon.
   Contrairement au Maroc, où le thurifère, soumis à une intense pression anthropique, est en forte régression, dans nos Alpes méditerranéennes il est en voie de reconquête suite à la déprise rurale généralisée. La vigoureuse régénération naturelle de cette essence en fait un candidat de premier rang pour répondre aux défis du réchauffement climatique.

Pelouses et prairies de montagne

À côté des forêts, les pelouses et prairies sont le deuxième type d'occupation du sol à marquer les paysages.

Naturellement, les reliefs, par l'évolution de l'altitude, les différentes déclivités, les variations d'exposition ou leur impact sur la pluviométrie, permettent la juxtaposition d'une multitude de conditions créant autant de milieux ouverts différents.
On peut en distinguer deux grands ensembles dans les Alpes-de-Haute-Provence.

• Au fond et sur les versants des vallées des prairies très diverses, favorisées par l'homme, qui couvrent de grandes surfaces.
• Sur les sommets méditerranéens, une flore herbacée "méditerranéo-montagnarde" spécifique adaptée à la conjonction des contraintes liées à l'altitude et à l'influence méditerranéenne.

Pelouses alpines

   Dans les hautes vallées de l'Ubaye ou du Verdon, l'isotherme 0°, qui marque la transition entre les étages subalpin et alpin, se trouve vers 2200-2400 m.
   Le froid est la principale contrainte à laquelle doivent faire face les plantes alpines. Mais ce n'est pas la seule. Les contrastes jour/nuit (à 2500 mètres, les feuilles d’une plante exposée au sud peuvent passer de –10 °C la nuit à +40 °C dans la journée), le vent, le gel, les fortes luminosités et l'exposition aux UV, la neige sont d'autres difficultés qui, de plus peuvent, se combiner.

   Différentes adaptations permettent aux plantes alpines de se développer, lentement durant une courte période de végétation (parfois seulement quelques semaines), dans ces conditions difficiles.

   L'évitement est la stratégie privilégiée.
   La température au ras du sol est supérieure à celle qui règne quelques dizaines de cm au-dessus. Une petite taille est une des caractéristiques typique des végétaux de l'étage alpin. Nombre d'entre-eux sont des plantes à bulbes ou à tiges souterraines, ce qui protège les bourgeons essentiels à la survie, mais très vulnérables.
   Cette petite taille limite aussi l'action mécanique du vent et de la neige tout en profitant de l'isolation thermique de cette dernière.
   De nombreuses espèces adoptent une forme en coussinet qui limite l'action du vent et agit comme un piège à chaleur.

   Une autre stratégie, dite de tolérance, consiste à abaisser le point de congélation des tissus pour supporter des températures négatives. L'accumulation de molécules comme les sucres ou les protéines dans les cellules permet d'abaisser ce point de congélation. La présence de pigments "piégeant" les UV est fréquente chez les plantes de haute montagne.

   Combinaison des deux stratégies, la cuticule (revêtement plus épais) brillante des feuilles et la pilosité, souvent abondante, sont des isolants thermiques et des filtres à UV efficaces.

   Le froid ralentit fortement l’activité des micro-organismes du sol, responsables de la transformation de la matière organique morte en matière minérale assimilable par les végétaux. Les sols alpins souffrent donc d'une pénurie en azote. Dans les zones à forte accumulation neigeuse, l'azote atmosphérique est piégé dans la neige. Certaines espèces ont développé des stratégies pour l'utiliser lors de la fonte.

   Vivre en altitude est difficile, s'y reproduire aussi…
   Les annuelles passent la mauvaise saison sous forme de graines. Leur cycle (de la germination à la fructification) s'effectue pendant la courte période de végétation. Mais le faible nombre de plantes annuelles que l'on rencontre en haute montagne montre que peu nombreuses sont celles qui maîtrisent cette stratégie à haut risque face au nombre et à l'intensité des aléas susceptibles d'empêcher la reproduction (gelées tardives au printemps, tardives à la sortie de l'été, vent ou son absence empêchant la pollinisation ou perturbant la dissémination des graines, etc.).
   La très grande majorité des alpines sont alors des plantes vivaces à grande longévité (30 à 100 ans) présentant une reproduction sexuée et une reproduction végétative permettant la dissémination de l'espèce même en cas d'échec de la floraison.
   La hampe florale de la renouée vivipare porte des fleurs et des bulbilles, petits "bourgeons" qui, tombés au sol, peuvent "germer" en redonnant une plante identique aux parents. La proportion de bulbilles augmente avec l’altitude montrant que la reproduction végétative devient prépondérante lorsque les conditions de vie deviennent plus difficiles.

   Par ailleurs, les plantes alpines optimisent certaines étapes clés comme la pollinisation en augmentant la taille de leurs fleurs, en les rendant plus attirantes et en les épanouissant plus longtemps.

   La "coopération" est une autre originalité la flore alpine.
   Quand des plantes se trouvent en contact les unes avec les autres, deux types d'interactions peuvent se manifester, la compétition ou la facilitation.
   La compétition entraîne une diminution de la performance d'un individu en présence d'un autre organisme (par exemple la sécrétion des substances inhibant le développement des autres plantes).
   La facilitation augmente les performances d'un individu en présence d'autres organismes. Certaines plantes peuvent conduire à une augmentation des nutriments, à la diminution de l'intensité lumineuse, d'une perturbation physique ou encore à la protection contre les herbivores de ses voisines.
   Récemment, des recherches ont montré que les phénomènes de facilitation deviennent majoritaires aux altitudes élevées.

   Dans ce contexte général toujours hostile, les microconditions locales déterminent des communautés différentes.

   Sur les pentes bien exposées se développent une flore "de mode thermique". Déneigées tôt en saison, elle subit au printemps et à l'automne des périodes de gel-dégel importantes qui mobilisent le sol. La végétation est ensevelie à l'amont et déchaussée à l'aval. À terme, se forment des gradins constitués d'une marche plus ou moins large, souvent nue, limitée par deux contre-marches végétalisées. Les touffes de graminées, au port et à orientation des feuilles verticales qui composent ces contre-marches ont un système racinaire puissant qui stabilise la pente. Ne pouvant se développer que latéralement, elles forment des guirlandes discontinues qui suivent les courbes de niveau.
   Les pelouses calcaires subalpines à alpines, typiques de ces formations en gradins, sont structurées par la seslérie (Sesleria caerulea), l'avoine des montagnes, (Helictotrichon sedenense) et la laîche toujours verte (Carex sempervirens). Ces "fixateurs" permettent la présence d'espèces moins aptes à résister seules aux mouvements de terrain : globulaire (Globularia cordifolia), herbe d'or (Helianthemum grandiflorum), sabline (Arenaria multicaulis), buplèvre (Bupleurum ranunculoides), scutellaire (Scutellaria alpina)…

   Les communautés végétales "de mode alpin" sont installées en pied de versant nord ou dans les dépressions et replats des versants d'adret. Protégées du froid hivernal par une couverture de neige de durée moyenne, elles subissent un déneigement plus tardif. Le couvert végétal est le plus souvent continu, les espèces sont souvent de taille modeste et beaucoup montrent une orientation des feuilles horizontales.
La fétuque violette (Festuca violacea) et le trèfle de Thal (Trifolium thalii) sont typiques de ces formations. Ils forment un groupement fermé à diversité floristique élevée où l'on trouvera le botryche lunaire, l'astragale, le lotier et l'homogyne des Alpes, la campanule de Scheuchzer, le myosotis alpestre ou encore la gentiane printanière et le magnifique lin des Alpes.

   Sur les versants exposés est ou ouest, et sur la partie médiane, voire inférieure des versants sud s'installent des pelouses "de type intermédiaire". L'enneigement y est plus court que dans le mode alpin, et les mouvements du sol moins intenses que pour le mode thermique. Le couvert végétal, assez conséquent, mêle plantes plus ou moins grande à feuilles verticales ou horizontales.
   Aux étages subalpin supérieur et alpin, entre 2000 et 2600 m, les pelouses acidiphiles à trèfle des Alpes (Trifolium alpinum), laîche toujours verte (Carex sempervirens) et nard (Nardus stricta) sont emblématiques de ce type de formation.    La benoîte des montagnes (Geum montanum) ou la gentiane acaule (Gentiana acaulis) sont associées à ce groupement tout comme la véronique d'Allioni (Veronica allionii) ou encore le très bel œillet œil de paon (Dianthus pavonius). Dans leur partie supérieure, ces pelouses sont fortement colonisées par le jonc trifide (Juncus trifidus).

   L'ultime tapis herbeux se développe sur les croupes, arêtes ventées, cols où règne un microclimat extrêmement rude. Ces communautés "de mode cryophile" (qui aime le froid) sont déneigées régulièrement par les vents violents et soumises à des températures hivernales glaciales entraînant un gel en profondeur. Aux inter-saisons, elles subissent des cycles de gel-dégel à l'origine de formation de colonnettes de glace appelées pipkrakes, longues de quelques millimètres à quelques centimètres, qui se développent perpendiculairement sous la surface du sol provoquant le soulèvement de cailloux. Par leurs actions répétées, ces pipkrakes engendrent un remaniement du sol et conduisent au déchaussement des touffes de végétation. Les vents quasi permanents sont également responsables de l'érosion et de la dégradation du tapis végétal en asséchant et blessant régulièrement les plantes.
   Les touffes d'élyne queue-de-souris (Carex myosuroides), en milieu calcaire, ou la laîche du mont Rose (Carex curvula subsp. rosae) dominent le maigre tapis végétal. Entre elles se trouvent de nombreux lichens terricoles et des plantes basses à naines, généralement en rosettes particulièrement armées contre l'inhospitalité des lieux. Ce sont le feutrage de l’antennaire des Carpathes (Antennaria carpatica) et de l’oxytropis de Suisse (Oxytropis helvetica), le port en coussinet de la drave des Pyrénées (Petrocallis pyrenaica), les feuilles imbriquées de la gentiane de Schleicher (Gentiana schleicheri), épaisses et denses du pâturin glauque (Poa glauca)…
   Sur les arènes siliceuses, les quartzites et les schistes acides, ce sont les pelouses acidiphiles à jonc trifide qui prennent le relais. D'aspect plus terne, en raison d’une moindre diversité en espèces végétales à floraison colorée, elles se repèrent bien grâce à la teinte brunâtre de ce petit jonc parfois associé à la rare seslérie du Piémont (Oreochloa seslerioides) et à la fétuque de Haller (Festuca halleri), encore plus rare. Des plantes en coussinet comme le silène acaule (Silene acaulis) ou la saxifrage fausse-mousse (Saxifraga bryoides), la raiponce hémisphérique (Phyteuma hemisphaericum), le séneçon blanchâtre (Senecio incanus) apportent un peu de couleur à ce type de pelouse.
   Celles-ci forment des liserés au sein des croupes et arêtes rocheuses ou caillouteuses, sur sols superficiels pauvres en matière organique.

   Dans les dépressions de basse et moyenne altitude à la végétation d'une couleur vert-bleuâtre caractéristique, la couverture neigeuse persiste plus de 6 mois et entretient un microclimat froid et humide durant une partie de l'été.
   À la fonte des neiges, une explosion de fleurs blanches puis d'étoiles jaunes signale le groupement qui les peuple. Ce sont les floraisons éphémères de la renoncule de Küpfer et de la gagée de Liotard qui seront remplacées quelques semaines plus tard par les taches bleu-vert des feuilles de vulpin de Gérard.
   Ce groupement peu diversifié, installé sur sols acides, est bien présent sur les substrats intermédiaires de type schiste ou flysch.

   À haute altitude, les combes à neige et les ubacs sont occupés par des communautés "de mode chionophile" (qui aime la neige). La longue durée de la couverture neigeuse du sol, excédant souvent huit à dix mois, est permet l’installation de ces oasis verdoyant en plein été.
   Très rase, cette végétation concentre une colonie de bonsaï, des arbrisseaux nains rampants qui profitent au maximum de la chaleur du sol en épousant toutes ses aspérités. Ce sont majoritairement des saules (Salix herbacea, S. reticulata, S. retusa). Ils peuvent couvrir plusieurs mètres carrés montrant ainsi leur grande longévité compte tenu de leur croissance très lente (0,1 mm de diamètre par an).
   Dans le détail, la flore des combes à neige diffère selon de la durée de la couverture neigeuse, de l’humidité du sol et de la nature du sol.

   Les sols acides présentent une grande diversité.
   Les replats à durée d'enneigement inférieure à 8 mois et à sols très humides à détrempés, formant parfois des mares temporaires en début de saison, sont colonisés par la laîche fétide (Carex foetida) associant fréquemment quelques espèces de milieux humides comme la laîche des frimas (Carex frigida).
   Si la durée d'enneigement excède 9 à 10 mois, une végétation pionnière s'installe sur des sols plus grossiers et moins humifères et presque ruisselants. Il s'agit d'un tapis herbacé très ras, très vert, clairsemé. Il est dominé par le pâturin couché (Poa supina) associé au céraiste faux céraiste (Cerastium cerastoides). Ce tapis est parfois ponctué par de minuscules fleurs portées par la sagine glabre (Sagina glabra) ou la sagine de Linné (S. saginoides).
   Le saule herbacé se développe sur les fonds plats où ne coule aucun ruisseau avec un enneigement compris entre 8 et 10 mois.
   Une durée d'enneigement à peine moins longue mais une humidité plus élevée permet à la jolie alchémille à cinq folioles (Alchemilla pentaphyllea) d'occuper le terrain. Entre ses feuilles vert vif, quelques pygmées de la flore alpine tente de se faire une place comme le gnaphale couché (Omalotheca supina) ou la jolie sibbaldie (Sibbaldia procumbens), une petite rosacée aux feuilles à trois folioles de couleur bleuâtre.
   À la limite des neiges éternelles, les combes acidiphiles sont colonisées par un gazon luisant vert foncé compact dominé par les mousses et hépatiques.

   Si le substrat est riche en calcaire, les combes à neige sont beaucoup moins verdoyantes et constituent un tapis souvent discontinu et caillouteux de petites plantes à rosettes et de saules nains plaqué au sol.

   Une végétation pionnière formée d'un lacis de saules rampants (Salix retusa, S. reticulata) colonise les gradins rocheux froids et les pierriers grossiers en voie de stabilisation. Sur ces sols, toujours constitués d'une épaisse couche d'humus brut, quelques espèces comme le pâturin des Alpes (Poa alpina), la renouée vivipare (Bistorta vivipara), la jolie soldanelle (Soldanella alpina) et la saxifrage fausse-androsace (Saxifraga androsacea), accompagnent le groupement.
   Dans les situations plus exposées, les saules sont souvent associés à une espèce des frimas, la dryade (Dryas octopetala) et beaucoup plus rarement, à l'éphémère laîche pied d'oiseau (Carex ornithopoda).

   Les dépressions de cailloutis situées à la base des versants ébouleux, plus longuement enneigées sont investies par une végétation très clairsemée constituée par de petites plantes en rosettes. La délimitation avec les véritables éboulis est souvent floue et progressive et ces communautés sont largement pénétrées par les espèces d'éboulis. L'arabette bleuâtre (Arabis caerulea) caractérise ces lieux, associée au cresson-de-chamois (Hornungia alpina) et assez souvent accompagnée par deux véroniques (Veronica aphylla, V. alpina).
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