Le XIXe siècle
Au début du XIX
e, les concepts et outils botaniques sont en place : nomenclature, clés dichotomiques pour l’identification, taxonomie (terme donné par De Candolle en 1813 à la science de la classification).
Flora Gallica de Augustin-Pyramus de Candolle en 1828 ou la
Flore de France de Grenier et Godron, 1848-1856, premières flores conçues suivant ces principes modernes, permettent à tous les botanistes, pratiquement pour la première fois, d’utiliser un référentiel commun. Tout un chacun, ou presque, peut alors y aller de son herborisation.
De nombreuses sociétés savantes voient le jour (la
Société linnéenne de Lyon est créée en 1822, la
Société botanique de France en 1854). Leurs activités de découverte, directement (les voyages d’étude de leurs membres) ou indirectement (par tout un réseau de correspondants) et l’enregistrement des données (par la publication et l’archivage de celles-ci) contribuent grandement à une meilleure connaissance du patrimoine naturel.
Dans les Alpes-de-Haute-Provence, alors pourtant que le département connaît une grave crise sociale, économique et démographique (en grande partie pour des raisons environnementales), des milliers d’observations, de nombreux herbiers (pour des milliers de plantes récoltées et conservées ainsi), des catalogues ou comptes-rendus d’excursions sont le fruit de la prospection du département par des botanistes reconnus, de simples passionnés, des amateurs éclairés ou encore des collecteurs professionnels.
Avant 1850, les principaux apports à la connaissance de la flore du département sont dus à Simon-Jude Honnorat.
Né en 1783 au Haut-Villard, un hameau reculé d’Allos, il effectue ses études de médecine à Grenoble, où il suit les enseignements botaniques de Dominique Villars, puis à Paris où il conforte sa passion naturaliste en suivant les cours dominicaux de Antoine-Laurent Jussieu, directeur du Muséum national d’histoire naturelle et titulaire de la chaire de botanique à la faculté de Médecine.
C’est donc un médecin doté d’un solide bagage naturaliste qui s’installe à Digne en 1809 où il résidera jusqu’à son décès en 1853.
À côté de sa pratique professionnelle, il se consacre à ses deux autres passions, les sciences naturelles et la rédaction du
Dictionnaire de la langue d’Oc particulièrement riche, ceci expliquant cela, en vocabulaire naturaliste.
En 1832 il a fini la rédaction d’un
Catalogue des Plantes de la Provence dans lequel il recense près de 2500 espèces dont un grande partie observées dans les Alpes-de-Haute-Provence. Il est également l’auteur d’autres publications sur la flore, mais aussi l’entomologie, l’ornithologie ou la paléontologie.
Son herbier général, monument de 20-25 énormes volumes, est malheureusement dispersé après sa mort. Mais S.-J. Honnorat faisait aussi des herbiers propres à des localités précises, et c’est ainsi que nous pouvons toujours consulter son
Herbier de Faillefeu (commune de Prads-Haute-Bléone) au Musée Gassendi de Digne-les-Bains.
La seconde moitié du XIX
e propose un aréopage de botanistes ou récolteurs aux parcours et profils divers, malheureusement trop nombreux pour être tous nommés.
On pourra y croiser Ludovic Legré (1838-1904), avocat à Aix-en-Provence… et par ailleurs excellent botaniste. Ami de F. Mistral et T. Aubanel, il participe à la préparation de l’herbier du
Museon Arlaten et publie plusieurs ouvrages sur
La botanique en Provence au XVIe siècle.
Dans les Alpes-de-Haute-Provence, il herborise autour d’Allos, où il découvre une épervière rupicole que lui dédie Casimir Arvet-Touvet,
Hieracium legraeanum Arv.-Touv.. À l’ouest de la Durance il découvre un sorbier hybride, fertile et micro endémique de la montagne de Lure [
Sorbus aria (L.) Crantz x
S. aucuparia L.] qui lui a été dédié récemment (2008) sous le nom de
Sorbus legrei Cornier.
Émile Burnat (1828-1920) ou Élysée Reverchon (1835-1914) sont d’autres grands noms qui ont prospecté dans les Alpes-de-Haute-Provence.
Le premier est un très grand botaniste genevois qui, étudiant la flore des Alpes-Maritimes, a herborisé dans tout le bassin du Var, y compris sa partie bas-alpine.
Le second, originaire de Bollène dans le Vaucluse, est connu comme infatigable récolteur professionnel qui vendait ses récoltes à des botanistes fortunés. Il a particulièrement prospecté la région d’Annot.
Les annales des sociétés savantes sont une autre source importante d’enseignements.
On trouve ainsi dans les Annales de la Société linnéenne de Lyon le récit d’une excursion d'Alphonse Gacogne (professeur d’histoire, membre des Sociétés botaniques de France, de Lyon et de la linnéenne de Lyon) dans l'Ubaye.
EXCURSION BOTANIQUE DANS LA VALLÉE SUPÉRIEURE DE BARGELONNETTE (Basses-Alpes), par M. Alphonse Gacogne. :
"Je partis de Lyon au milieu de juillet 1877, dans l'intention de visiter la partie supérieure de la vallée de l'Ubaye ; je devais prendre pour compagnon de courses le Capitaine des douanes de la Condamine, M. Lannes, votre correspondant et mon ami, qui connaît parfaitement la Flore des pays que nous devions parcourir.
[…]
Le temps était superbe ; c'était le cas de faire la plus longue de nos excursions, celle des lacs et du col Longet. M. l'abbé Brun, le Capitaine et moi partons en char à trois heures du matin, par un ravissant clair de lune et une tiède nuit. Le chemin côtoyait toujours l'Ubaye ; après une demi-heure nous passons devant le fort Tournoux, qui domine à gauche la vallée de l'Ubaye et de St-Paul, et à droite la vallée de l'Ubayette et de Larche. La rivière et la route occupent le fond de la vallée et sont bordées à droite par une haute muraille de rochers nus, dont quelques sommets ont encore de la neige ; le côté gauche, plus boisé, offre çà et là des cultures. Bientôt nous apercevons le clocher et les maisons du village de Tournoux dispersées sur la hauteur. La flore des prairies qui avoisinent St-Paul, sur la rive gauche de l'Ubaye, n'a rien d'intéressant pour le botaniste ; à part les Phyteuma Halleri AU., Centaurea leucophœa Jovi., Linaria italica Trev., et Thlaspi virgatum G. G., ce qu'on trouve ne vaut pas la peine d'être récolté.
[…]
Après une heure donnée au repos nous reprîmes notre route sans arrêt jusqu'aux lacs et au col Longet. L'herbe dans la prairie devenait moins épaisse, nous approchions des pâturages ; tout à coup j'entre dans un véritable champ d'Anémone narcissiflora en pleine floraison ; nous assistions donc au premier printemps dans cette région élevée. Au court gazon succèdent les rochers qui percent une terre maigre ; nous entendons à distance le sifflement aigu des marmottes cachées dans les pierres. Enfin, nous voici aux lacs Longet ; ils sont au nombre de trois qui se déversent les uns dans les autres et forment la source de l'Ubaye, grossie encore par les eaux d'un glacier voisin. Partout le sol est couvert d'énormes éboulis de rochers tombés des crêtes voisines, autour desquels nous récoltons avec ardeur Anemone baldensis L., Cerastium latifolium L. Sur cette terre que la neige avait abandonnée depuis peu croissent une multitude de bonnes espèces : Anemone baldensis L. Leontopodium alpinum Gass. Gardamine resedifolia L. Antennaria carpathica Bl. Fing. — alpina Willd. Hieracium subnivale G. G. Sisymbrium pinnatifidum L. Gentiana nivalis L. Viola calcarata L. — tenella Rottb. Gerastium latifolium L. Androsace carnea L. Potentilla pedemontana Reat. — obtusifolia Ail. Phaca alpina Jacq. Soldanella alpina L. Oxytropis campestris DC. Veronica alpina L. Alchemilla pentaphylloa L. — aphylla L. Saxifraga biflora AU. — serpillifolia L. — muscoides Wulf. — saxatilis Jacq. — bryoides L. Bartsia alpina L. - petraea L. Pedicularis rostrata L. Pedicularis rosea Jacq. Juncus trifidus. Lloydia serotina Sal. Juncus triglumis L.
Je laissai mes compagnons escalader pendant cinq à six minutes les rochers pour arriver sur l'arête du col et voir le Piémont ; je ne sentais plus que le besoin du repos ; j'étais surpris par ce malaise des montagnes qui contraint celui qui l'éprouve dans les régions élevées à faire en montant de fréquents arrêts pour respirer ; nous étions à 2655 mètres. Je ne ressentis rien ni à la descente ni sur un terrain uni. Il aurait fallu passer deux jours ici pour explorer à fond cette localité, mais il n'y a pas d'auberge. Nous reprenons donc le chemin de Maurin, avec le regret de n'avoir pu visiter les alentours du glacier. A six heures du soir nous remontons dans notre char ; puis nous laissons à St-Paul, M. l'abbé Brun, notre aimable compagnon de course, qui devait le lendemain franchir de nouveau le col de Vars pour revenir à son presbytère. Nous étions de retour à la Condamine à dix heures du soir, favorisés par un clair de lune magnifique qui nous laissait apercevoir la silhouette des montagnes et leurs formes fantastiques."
Dans la même veine, on peut citer également Octave Meyran. Employé de commerce à Lyon, excursionniste passionné et amateur de botanique, il a été membre des Sociétés linnéenne et botanique de Lyon. Il conciliait ses passions en arpentant le Dauphiné et parfois l’Ubaye.
Excursions botaniques dans le Briançonnais et la partie supérieure de la vallée de l’Ubaye par Octave Meyran (août 1880) :
"24 août - Herborisation de Meyronnes au Lauzanier
[…]
Nous partons de Meyronnes, deux amis et moi, à 6 heures du matin ; une heure de chemin nous suffit à atteindre Larche. Là nous traversons l’Ubayette sur un rustique pont de bois pour aller cueillir le Cardamine asarifolia L., qui est très abondant dans les prairies humides. Malheureusement notre espérance est décue, car cette rare Crucifère a été détruite par les moutons.
Nous reprenons donc notre chemin dans la direction du hameau de Malboisset.
Dépassant Maison-Méane, nous franchissons le ruisseau d’Horonaye, puis, prenant le sentier à droite, nous atteignons en une heure et demie la belle prairie en pente douce qui se prolonge jusqu’à la cascade du Lauzanier. Dans cette prairie, et malgré que la plus grande partie en soit fauchée, nous récoltons :
Aconiton anthorum L., - lycoctonu L., Huguenina tanacetifolia Rchb., Brassica Richeriana Vill., Geranion aconitifolium L’Her., Alchemilla alpina L. Galion vernum L., Hypericon fimbriatum Lam., Leucanthemon alpinum Lam., Aronicum scorpioideum DC., Campanula barbata L., Pinguicula alpina L., …
[…]
… nous continuons notre route jusqu’au lac du Lauzanier que nous atteignons à 1 heure de l’après-midi
Le lac, à une altitude de 2204 m, forme le fond d’un cirque de rochers gris, dénudés, et dont quelques sommets sont encore couverts de neige. Nous trouvons dans les prairies qui entourent le lac :
Arenaria ciliata DC., Hierochloa borealis R.Schult., Parnassia palustris L., Sweertia perennis L., Eriophoron alpinum L., - capitatum Host.
[…]
À 8 heures du soir nous étions rentrés à Meyronnes.
[…]
Meyronnes me rappelle le souvenir d’un modeste et savant botaniste, M. Cogordan, qui, quoique âgé de 87 ans, m’accompagna dans quelques unes de mes herborisations en 1875. Ancien soldat de la Grande-Armée, contemporain de Balbis, d’Aunier, de Champagneux et de la pléiade des botanistes qui ont vécu à Lyon durant la première moitié de notre siècle, il avait conservé avec ces savants des relations d’une amitié sincère que la mort seule devait briser. Pendant plus de trente ans il consacra les loisirs que lui laissaient ses fonctions de Juge de Paix à Saint-Paul à l’étude de la Flore de la vallée de l’Ubaye. Il fut le guide de tous ceux qui allaient herboriser dans ces riches montagnes, et dans ses dernières années, ne pouvant presque plus sortir, il leur donnait avec une grande obligeance tous les renseignements qui pouvaient leur être utiles. Lorsque je le vis pour la dernière fois le 14 septembre 1875, il mit le comble aux bontés qu’il avait toujours eues pour moi, en me faisant don de son herbier, fruit de longues années de travail.
Il mourut deux mois plus tard, regretté de tous ceux qui avaient eu l’occasion d’apprécier la droiture et l’aménité de son caractère.
[…]
J’ai tenu ici à rendre hommage à ce savant perdu au fond de ses montagnes et dont la science n’avait d’égale que la modestie."
Au fil de ces récits, nous rencontrons quelques-uns de ces Bas-Alpins qui, partageant une même passion de la botanique, participent à la connaissance de la flore des Alpes-de-Haute-Provence : M. Proal, instituteur à Bouzoulières (Faucon-de-Barcelonnette), M. Boudeille et J.-J. Lannes officier des Douanes dans l’Ubaye et le Briançonnais, D. Cogordan, Juge de Paix à Saint-Paul, l’abbé Olivier, curé à Enchastrayes ou encore Théodore Derbez, professeur à Barcelonnette.
Ce dernier, a exploré toute la vallée de l’Ubaye et ses affluents en amont du Lauzet-Ubaye jusqu’au col de Longet, Larche et le Lauzanier. Ses récoltes (intitulées
plantes de la Vallée de l’Ubaye) effectuées depuis 1890 jusque vers 1907, sont à l’origine d’un gros herbier (15.000 parts) déposé (et rénové) à l’A.M.U. centre de Saint-Charles (Marseille) sous l’autorité de Bruno Vila et Régine Verlaque. Cet herbier comporte notamment un grand nombre d’échantillons du genre
Hieracium (épervières) dont certains sont possiblement des échantillons types. Un hybride
Sedum x derbezii Petitm. (
S. annuum L. x
S. atratum L.) lui a été dédié par Petitmangin.
À la fin de ce XIX
e siècle, la connaissance floristique des Alpes-de-Haute-Provence a bien progressé, mais reste inégale.
Si l’Ubaye, l’ouest de la Durance, les régions d’Annot et de Digne-les-Bains commencent à être bien connues, le Bassin du Sasse, le Plateau de Valensole ou les reliefs du Verdon sont encore peu prospectés.
Le XXe siècle jusqu’aux années 1990
Au XX
e siècle, le divorce avec la médecine est consommé, les universités
des sciences prennent le relais. La botanique prend une dimension écologique avec l’essor de la phytosociologie. Les flores de référence évoluent, Flore de Bonnier au début du siècle, Flore de Coste dans les années 1920, Flore de Fournier dans les années 1940 et Flore du CNRS dans les années 1960.
Dans notre département, les prospections se poursuivent, les thèses et travaux universitaires se multiplient, un catalogue raisonné de la flore des Alpes-de-Haute-Provence rassemble et analyse les données disponibles.
Le catalogue raisonné de la flore vasculaire des Alpes-de-Haute-Provence
Au début du XX
e siècle, les prospections se poursuivent.
La Société Linnéenne de Provence est créée en 1909, de nombreux récolteurs ou botanistes accumulent des observations.
Émile Derock et Jean-Baptiste Maurin rédigent un catalogue (qui reste sous forme de manuscrit) de la flore du secteur d’Allos.
Pierre Le Brun et Joseph Soulié, abbé de son état, explorent à bicyclette le sud du département, et notamment les grandes gorges du Verdon où ils observent
Phyteuma villarsii R.Schulz et
Asplenium jahandiezii (Litard.) Rouy.
D’Auvillac à Nice, par les Causses, le Vivarais et les Alpes de Provence - ou vingt jours de cyclo-herborisation - par MM. l’abbé Soulier et P. Le Brun. :
"
Le soir [du 11 juillet 1919], une excursion de trois jours fut décidée. […] l’attrait du Midi et de la montagne l’emportant, nos deux botanistes allaient prendre, le 13 juin, le train à Orange, et le soir même, ils débarquaient à Draguignan.
Pour gagner du temps, l’on décida de gagner de nuit, à bicyclette, Comps et le pont de Carajuan, point des gorges du Verdon qui devait servir de centre de récoltes. […]
À l’entrée des gorges du Verdon, entre le pont-Soleil et le pont de Carajuan (Basses-Alpes), sur le talus de la route de La Palud, en abondance le rare Arenaria cinerea D.C.
Les corniches de rochers surplombant la route à l’aval du pont de Carajuan, les grottes de la rive droite de la rivière, le plateau des Fossiles, d’où la vue embrasse, saisissante, l’infernal tableau formé par l’entrée du grand cagnon du Verdon ; toute cette région, qui constitue un véritable jardin botanique, lieu de rendez-vous de plusieurs endémiques, fut exploré avec soin, et une splendide récolte ne tarda pas à récompenser le zèle de M. l’abbé Soulié qui, insouciant du vertige, s’était aventuré sur les grands escarpements dominant la route, en aval du pont de Carajuan.
Successivement furent récoltés : Arenaria capitata Lamk. ; Arenaria cinerea D.C. ; Moehringia dasyphylla Bruno ; Hypericum coris L. ; Genista villarsii Clem. ; Astragalus incanus L. ; Astragalus aristatus L’Her. ; Astragalus purpureus Lamk. ; Paronychia serpyllifolia D.C. ; Telephium imperati L. ; Galium pusillum L. ; Serratula nudicaulis D.C. ; Campanula macrorhiza Gay ; Phyteuma villarsii R.Schultz ; Passerina dioica L. Asplenium jahandiezii R.Lit.
[…]
Un violent orage immobilisa les deux voyageurs pendant plus d’une heure au pont-Soleil. Puis la course continua, vers Castellane, par les importants défilés de la clue de Taulane et des Cadières de Brandis, dont les rochers, couverts de magnifiques thyrses du Saxifraga lantoscana Boiss. et Reut., abritaient, là encore, le précieux Asplenium.
Le Monde des Plantes n° 121, 1919"
Cependant, depuis S.-J. Honnorat, toutes ces observations restent, au moins pour les Alpes-de-Haute-Provence, éparses et plus ou moins confidentielles.
Dans les années 1910 Louis-Auguste Dessalle se propose de compiler et d’analyser toutes les données disponibles, initiative à laquelle il se consacre pendant 20 ans, jusqu’à son décès en 1931.
De sa rencontre, dans les années 1920, avec Louis Laurent, maître de conférence à la Faculté des Sciences de Marseille qui poursuit ce travail, va naître le Catalogue raisonné de la flore vasculaire des Basses-Alpes.
Les deux premiers tomes sont publiés par L. Laurent en 1935 et 1940. 1202 des 2326 espèces du catalogue y sont présentées.
À la mort de Louis Laurent, c’est son élève, Gabriel Deleuil (1912-1983) qui, sur la base des documents transmis par la famille de L. Laurent, reprend le flambeau. Il parcourt inlassablement durant plus de vingt ans les routes et les sentiers du département, pour compléter, réactualiser, critiquer l’inventaire floristique bas-alpin, mais décède avant la parution des 2 derniers volumes.
Ceux-ci sont publiés par Pierre Donadille, en 1986 et 1989.
À la fin des années 1980, ce sont ainsi près de 50.000 données concernant les Alpes-de-Haute-Provence qui sont compilées, analysées finement et, pour une bonne part d’entre-elles, assez bien localisées.
Les travaux universitaires et l’apport de la phytosociologie
Après la seconde guerre mondiale les publications de chercheurs ou d’organismes scientifiques se multiplient. Elles concernent essentiellement la phytosociologie.
Charles Flahault, l’un des pères français de la discipline avait herborisé dans les Alpes-de-Haute-Provence. Par ailleurs mentor de L.-A. Dessalle et L. Laurent, il a joué un rôle non négligeable dans leurs décisions de se lancer dans l’aventure du Catalogue raisonné des Basses-Alpes.
Josias Braun-Blanquet, père de l’école dite
zuricho-montpelliéraine de phytosociologie a herborisé en Ubaye pour la rédaction de
la végétation alpine et nivale des Alpes françaises (1954).
Le centre Saint-Charles de la Faculté des Sciences de Marseille a compté un important groupe de biologistes du monde végétal dirigés par le Professeur René Molinier - phytosociologue de renom. Dans les années 1950 cette équipe a levé des cartes de végétation au 1/50.000 de la Provence, dont, bien sûr, les Alpes-de-Haute-Provence.
Les apports de ces différents travaux sont de plusieurs ordres.
- Ils nécessitent le plus souvent des inventaires qui viennent enrichir le stock de données.
- Ils permettent d’appréhender et de comprendre la répartition des espèces.
- Ils expliquent ou précisent des points particuliers. Il en est ainsi, par exemple, de la thèse soutenue en 1960 par André Lavagne sur la végétation forestière de l’Ubaye, de celle de Claude-Charles Mathon sur les phytocénoses de la montagne de Lure, ou encore d’études sur tel ou tel taxon ou groupe de taxons difficile.
À la fin des années 1980, on recense environ 121.000 observations (contre ± 14.000 au début du siècle). Cependant ces observations sont inégalement réparties et la prospection du département reste en grande partie insuffisante.
Mais la fin du XX
e siècle va voir une conjonction remarquable d’évènements qui impulsent une dynamique nouvelle à la botanique en général et à la connaissance de la flore des Alpes-de-Haute-Provence en particulier.